Une soirée au RestoBus, le réconfort des gens de la rue
Le RestoBus parcours la ville d’Angers depuis 2013. Depuis qu’il a commencé son périple, 142 936 repas ont déjà été servis, et il ne compte pas s’arrêter de sitôt. Embarquons à bord du RestosBus le temps d’une soirée.

Depuis 2013, le RestoBus sillonne les rues d’Angers avec la volonté d’apporter des repas chauds aux gens de la rue, de manière inconditionnelle et totalement gratuite. Tous les lundis, mercredis et vendredis soir, le RestoBus s’arrête à des endroits fixes pour servir des repas chauds, fournir des produits d’hygiène et des vêtements grands froids et échanger avec les gens de la rue. Aucune question n’est posée par les équipes du RestoBus : aucune condition pour avoir le droit à un repas complet. Mais souvent, les discussions vont bon train. Plus que de servir un repas chaud, le RestoBus, c’est aussi l’occasion de créer du lien, d’orienter les gens de la rue vers des structures d’aide et de leur donner les renseignements nécessaires concernant leurs droits à l’hébergement ou à la santé.
Chaque soirée a son équipe de bénévoles, et si quelquefois certains ne viennent pas toutes les semaines, la plupart se rendent disponibles de 17h à 0h30. Eh oui, le RestoBus demande un fort engagement de la part des bénévoles, la soirée est longue et il faut aller vite pour servir en moyenne 130 repas par soir. Mais les bénévoles sont formels : ça en vaut la peine ! Au fil des semaines, les bénévoles apprennent à connaître les habitués, leurs histoires.
Vendredi soir, 17h00, les bénévoles arrivent à la base logistique de Saint-Barthélemy pour préparer le RestoBus à sa longue soirée. Au programme, deux arrêts : place François Mitterrand et place Semard à la gare routière. Eau chaude pour le café et le thé, thermos de chocolat chaud, produits d’hygiène, tables, chaises, sucre, sel, norvégiennes qui tiennent au chaud les plats fournis gratuitement par Sodexo que l’on va chercher à la Clinique de l’Anjou. Pour tout préparer à l’heure, il faut être efficace et travailler en équipe. Une fois la liste de préparation complétée, il faut tout charger dans le RestoBus et dans les fourgons. Ce soir nous sommes 16 bénévoles pour faire la soirée, installer les tables, servir les repas dans le bus et à l’extérieur, servir les boissons chaudes, distribuer les produits d’hygiène et les vêtements, et tout nettoyer. Environ 12 bénévoles minimum sont nécessaires chaque soir pour être efficaces et assurer le service au départ de la base logistique.
19h00, le RestoBus démarre et commence officiellement sa tournée. Premier arrêt : place François Mitterrand. Un groupe de personnes l’attend déjà, certains discutent avec le SAMU Social, présent tous les vendredis à cet endroit pour apporter une écoute active à ceux et celles qui en ont besoin. Premier passage obligé pour les personnes accueillies : le lavage de main avec un savon bactéricide, héritage du COVID. Elles s’installent ensuite dans l’une des 19 places assises à l’intérieur du bus ou sur la quinzaine de tables à l’extérieur avant de se faire servir l’entrée, le plat chaud et le dessert. Après le service, l’espace hygiène est ouvert : debout à l’arrière d’une camionnette, un bénévole se charge de trouver les bonnes tailles de vêtements dans les sacs entassés. Parka, polaires, tee-shirt, legging, chaussettes, sous-vêtement, sac à dos, sac de couchage, il faut s’y retrouver. 49 personnes, dont 2 enfants, ont été servies au premier arrêt.
20h45, le RestoBus redémarre et continue sa course vers le second arrêt : la place Sémard à la gare. A la gare, il y a plus de monde : des groupes, des gens seuls, parfois des familles. La plupart sont des gens de la rue, habitués au RestoBus. 115 personnes, dont 8 enfants, ont été servies au deuxième arrêt.
22h30, fin de la tournée pour le RestoBus. Il est l’heure de repartir à l’entrepôt pour tout ranger et tout nettoyer pour que tout soit prêt à l’usage pour le lundi suivant. Efficacité oblige, ce soir-là, nous finissons le rangement à 0h15. La dernière étape obligatoire pour l’équipe : le debrief. Après chaque tournée, les bénévoles prennent le temps de se regrouper pour discuter de la soirée et mettre par écrit les points importants, pour tenir au courant les équipes du lundi et du mercredi. Une étape nécessaire et très importante selon Karina Besnard, responsable de soirée, et qui permet de réfléchir aux points d’amélioration du RestoBus. Ce soir-là, la question de l’ouverture ou non du RestoBus cet été est abordée : faut-il arrêter la distribution pendant une semaine, deux semaines, pas du tout ? La question posée par Ida, bénévole, démontre l’importance des tournées « Si on n’est pas là, ils mangent quoi ? ». Respect des températures des aliments chauds et froids, qualité des plats, observations globales, autant d’éléments sont abordés lors du debriefing.
0h45, les portes du RestoBus se ferment, jusqu’à lundi soir.
Ce moment de réflexion est aussi l’occasion pour Lucie, nouvelle bénévole au RestoBus de donner son opinion sur la tournée. Le plus difficile pour elle a été d’entendre certains sans-abris interagir entre eux, des propos durs et crus surtout à l’encontre des femmes. Elle ne s’attendait pas non plus à voir autant de personnes venir au RestoBus. En formation pour être éducatrice spécialisée, Lucie voulait s’engager dans une association, les gens de la rue étant un public avec qui elle pourrait travailler plus tard, son choix s’est porté sur le RestoBus. Une première expérience réussie qu’elle ne regrette pas, puisqu’elle s’est engagée pour y retourner tous les vendredis.
Jeanne Lauzevis, Stagiaire UCO